Le coeur, le coeur qui bat à tout rompre. Elle ferme les yeux, elle ne veut pas voir, elle ne veut pas le voir. Il n'y a pas de douleur. Il n'y a pas de douleur. Ces mots tournent en boucle dans son esprit. Non, il n'y a pas de douleur, du plaisir, que du plaisir. Son plaisir à lui. Les larmes, ses larmes à elle coulent, elles coulent encore et encore, malgré sa volonté de les faire cesser. Elle a mal, elle le sait. Mais elle ne l'avouera pas, trop fière. Elle ne veut pas de cet homme, elle n'en a jamais voulu. Il est trop sec, trop brutal. Il ne cherche même pas à être doux avec elle, elle qui se fane à mesure que la vie s'écoule. Elle ne veux rien garder de lui. Rien. Elle veut l'effacer, juste après, quand il aura fini. C'est tout, tout ce qu'il voulait d'elle. Il ne l'a jamais aimé, elle le sait.. et ça aussi, ça fait mal.
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Elle efface les traces avec d'autres traces. Tout est flou. Son corps lâche prise dans les bras de l'inconnu. Elle ne pense plus, elle ne réfléchis plus. Elle se laisse faire, lui, il est doux. Elle veut croire qu'il l'aime. Elle veut le croire généreux, elle se l'imagine tendre, affectueux, elle sent sa peau, son odeur, ses caresses, et tout s'envole, jusqu'aux larmes, jusqu'aux rires, à la folie, à l'ivresse, au son d'une lyre. Demain, elle l'aura effacé, demain, il ne sera plus rien, mais là, elle s'endort, encore un instant dans ses bras.
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« Axelle ? Axelle ! » Pas de réponse. Les mots se heurtent au silence. La porte ne s'ouvre pas, rien ne bouge. La dénommée Axelle ne semble pas là. Pourtant les coups pleuvent contre la porte, de plus en plus violents, de plus en plus rapides. La porte cède enfin, et s'ouvre sur le corps de la jeune fille, elle doit avoir 16 ans, 17 ans à peine. Les bleus sur ses bras, le sang sur ses mains, la pâleur de sa peau, les cernes.. chaque parcelle de la peau reflète la décadence, la finitude.
« Quelle âge a-t-elle ? » la voix de l'infirmière est calme, très calme, trop calme. Il s'inquiète, tourne en rond depuis des heures. Il s'angoisse. Il sait qu'il a failli la perde, il sait que peut-être, il ne la reverra jamais.
« 17 ans. Elle a 17 ans. » répondit-il finalement. La jeune fille est étendue sur un lit d'hôpital, son corps inerte, elle reflète la mort dans toute sa splendeur. Il attendra des heures s'il le faut, mais lorsque les paupières s'ouvriront sur les grands yeux océans, il sera le premier présent, et surtout, il tentera de comprendre ce qui est passé par la tête de la demoiselle.
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Elle est appuyée contre l'encadrement de la porte, les bras croisés sous sa poitrine, admirant l'homme de dos. Il est face au miroir, boutonne sa chemise avec calme et ne s'aperçoit de la présence de la jeune femme qu'après. Elle porte une robe rouge sang, courte, avec un joli décolleté mettant en valeur ses formes, et elle semble attendre quelque chose.
« Axelle.. Pourquoi tiens-tu absolument à sortir ? Tu peux très bien me parler ici. » il s'est retourné, la regarde à présent dans les yeux, le brun s'opposant au bleu.
« Non. » c'est plutôt sec, elle est ferme, ne veut pas rester dans l'appartement.
« Ca fait un an, il faudra bien que tu effaces tout ça. » il est sérieux, et pourtant la douceur dans sa voix traduit ce qu'il pense : c'est impossible, d'oublier.
« Jamais. Viens, j'ai besoin de prendre l'air. » Il est son meilleur ami, son colocataire, il ne peut pas lui résister. Il voudrait parfois, mais il est tout à fait conscient du fait qu'il la toujours aimé, qu'il ne pourra pas cesser de la protéger et de nourrir ces étranges sentiments à son égard.
Ils sont descendu jusqu'à la fontaine de Mercy Falls, réputée pour exaucer les voeux. Lorsqu'elle est arrivée en ville, quelques années plus tôt, elle avait espéré que ce lieu changerait sa vie, qu'elle aurait enfin l'existence magique dont elle rêvait, mais les années passant, elle a bien comprit que rien n'était possible, rien ne la sauverai de cet enfers. Ils ont discuté longtemps près de l'eau, mais il s'est mit à pleuvoir avec violence, si bien qu'ils ont du se blottir l'un contre l'autre, qu'ils ont du se mettre à l'abri sous un porche. L'éclair a frappé la fontaine avec violence, la lumière les a aveuglé, et ce fut le noir le plus total.
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Elle était loin de se douter que tout empirerait après cet événement. Les flammes. Elle est devenue cet élément flambant qui la fascinait tant. Son corps reste le même, pourtant du bout de ses doigts, ou par sa simple volonté, le feu se déclenche. Ca la fascine autant que ça l'effraie, si bien qu'elle n'en parle pas, à personne, pas même à son seul et unique véritable ami, qui lui aussi semble étrange depuis quelques temps. Axelle ne maîtrise pas tout, surtout pas son environnement. Les gens lui semblent différents, et les jeux dangereux semblent le devenir de plus en plus. Qu'est-ce qui l'assure du fait que sa prochaine conquête ne sera pas capable de la geler sur place ? Elle doit s'assagir, se calmer, comprendre.. et pourtant une part de son être n'aspire qu'à la liberté la plus totale..